Archives de catégorie : Ressources & bibliographie

Inclure et reconnaître la diversité en église

Ce fut le thème d’une journée d’interventions organisée par le Carrefour des Chrétiens Inclusifs, la Maison Verte, The American Cathedral in Paris, la Mission Populaire Évangélique de France, notre association David & Jonathan, avec le soutien de Réforme, hebdomadaire protestant d’actualité, qui s’est tenue le lundi 17 octobre 2016 à l’Institut protestant de théologie de Paris.

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Le concept d’inclusivité, aujourd’hui en vogue dans les milieux chrétiens d’ouverture, permet de réfléchir aux conditions concrètes de l’accueil dans les communautés chrétiennes et les Églises. Il est entendu au sens large : on ne prend pas seulement en compte les problématiques des personnes homosexuelles ou transgenres mais également tout autre différence (le handicap, l’âge, etc. ainsi que les différents groupes minorés).

Cécile, de notre groupe protestant, participait à cette journée très intense et nous en a fait un compte-rendu qu’elle espère fidèle aux propos tenus. C’est un document riche d’enseignements que nous sommes heureux de vous faire partager :

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Nous terminons cet article par la prière que nous a jointe Cécile à son compte rendu :
Seigneur, puisses-tu mettre « chaque jour en nos bouches un cantique nouveau » (Ps 39) pour qu’advienne l’amour de ton Fils Jésus-Christ, amour que nous cherchons et demandons humblement à te rendre et à offrir à notre prochain.
Par ta grâce, que ton Esprit nous assure de ta présence active aujourd’hui dans nos vies, donne-nous de persévérer avec joie dans le désir de contribuer à faire advenir ta promesse d’une humanité pleinement réconciliée en ton Fils, promesse en laquelle nous espérons dans la confiance des petits enfants à la fois naïfs et orgueilleux que nous sommes : pardonne-nous et retiens notre bonne volonté parfois maladroite, féconde-la selon tes desseins…
Au nom du Christ nous t’en prions. Amen

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Quelques références sur le protestantisme : l’accès à la foi pour tou.te.s ?

En réponse à des questions sur la présence de protestant.e.s à D&J ou sur le protestantisme en général, je propose un éclairage qui donne quelques clés de compréhension tout en étant consciente que ce texte s’inspire également de ma manière de vivre mon protestantisme.

Bible.

Parfois centrée autour d’un petit monde d’universitaires, l’animation de la vie protestante ne parait pas toujours facile d’accès au néophyte. Chez les protestant.e.s, du moins en ce qui concerne les luthéro-réformés, il n’y a pas de dogme ce qui en constitue presque déjà un ! À la morale, les luthéro-réformés préfèrent l’éthique, aux certitudes les questionnements.
Cela étant dit la Réforme se base tout de même sur cinq « grands principes » qui sont : sola gratia (« par la grâce seule »), sola fide (« seule la foi compte »), sola scriptura (« par l’Écriture seule »), solus Christus (« Jésus Christ seul »), soli Deo gloria (« à Dieu seul la gloire ») auxquels on peut ajouter deux « façons de les vivre » : l’Église doit se réformer sans cesse et le sacerdoce universel c’est-à-dire l’égalité entre tous les membres de l’Église, pasteur.e.s et fidèles.
Le protestantisme c’est alors un engagement exigeant qui demande de passer du temps à lire les textes et à y réfléchir. La grande place que tient la prédication pendant les cultes accompagne cette réflexion. C’est aussi une éthique de responsabilité puisque chacun.e de nous est « en charge ».
Le débat théologique étant par essence inépuisable, c’est un cheminement continu qui conduit à de nouvelles idées, de nouvelles « façons de voir ou de percevoir ». C’est d’ailleurs dans cet esprit que, régulièrement, de grandes « questions » sont soumises à la réflexion de toute la communauté représentée en conseil synodal. Ce fût le cas pour la question de la bénédiction des couples (mariés) de personnes du même sexe qui, après avoir été débattue pendant des années, a fait l’objet d’une prise de décision adoptée lors du synode national de l’Église protestante unie de France (EPUdF), le 17 mai 2015 (cf. également le communiqué de D&J transmis avant cette décision).

Tous ces éléments, parfois mal connus, peuvent contribuer à rendre le protestantisme « difficile d’accès » et semblant réservé à une minorité. Cependant il y a un paradoxe dans cet état de fait qui parait contraire au principe même d’évangélisation. Si les luthéro-réformés paraissent parfois moins enclins à « évangéliser » que d’autres courants, cependant chaque chrétien.ne ayant reçu la parole des évangiles en son cœur ressent certainement l’envie de la faire partager.
Alors peut-on être protestant.e sans prendre part aux débats théologiques ? À titre personnel je pense que oui. Les protestant.e.s de la société civile sont nombreux qui ne se revendiquent d’aucune Église (cf. l’émission Protestants de France diffusée sur France 5).
Allons même plus loin : peut-on être protestant.e sans être croyant ? Lionel Jospin aurait dit : « Je suis un protestant athée, un rigide qui évolue, un austère qui se marre ». Quant à Michel Rocard, il se considérait agnostique. Au-delà des « petites phrases », les protestant.e.s se disent « laïc.que.s » ce qui signifie qu’il n’existe pas d’institutions ecclésiales faisant autorité d’elle-même, y compris sur la politique (les représentants sont des personnes laïques et sont élu.e.s). Cet attachement au principe de laïcité remonte notamment aux idées de la révolution française puis à la séparation de l’Église et de l’État en 1905. Par conséquent la seule institution humaine faisant « autorité » est celle de l’État. Mais être laïque ne veut pas dire obligatoirement être non croyant.

C’est là la particularité du protestantisme français. S’il est lié intrinsèquement à une démarche théologique chrétienne il n’en est pas moins une identité individuelle qui n’est pas exclusive à la spiritualité. Cette identité se base en partie sur le vécu de nombreuses familles amenées à se cacher pour vivre leur foi et à fuir les persécutions suite à la révocation de l’Édit de Nantes (dit Édit de tolérance) en 1695 et plus largement sur l’histoire de France, mais également l’impact des « grands principes » de la Réforme dans la façon de vivre au quotidien dans ces familles.
Faut-il être issu d’une famille « historique » pour être protestant.e ? Je veux croire que non. Bien des personnes s’intéressant au protestantisme ont une connaissance et une réflexion théologique plus approfondie que beaucoup de descendant.e.s de huguenots.
Le protestantisme peut être cette dualité entre spiritualité et identité culturelle qui tendent à se confondre pour laisser à chacun.e la possibilité de se construire sa propre « éthique de vie » chrétienne.
L’ouvrage La nouvelle France protestante (Sébastien Fath, Jean-Paul Willaime, éd. Labor et Fides, 2011) définit d’ailleurs cinq cercles d’appartenance au protestantisme allant des croyant.e.s et pratiquant.e.s réguliers aux athées se revendiquant de culture protestante en passant par les « sympathisant.e.s ». Toutes les couleurs de l’arc-en-ciel sont donc possibles et existent !
Pour terminer, si l’on me demande ce qui constitue mon identité je répondrais que je suis avant tout un être humain, ensuite chrétienne et seulement ensuite protestante mais également bien d’autres choses !

Stéphanie, responsable du groupe protestant de l’association David & Jonathan

Repères bibliographiques :

a) Général sur le protestantisme :

  1. ESQUISSE D’UNE SPIRITUALITÉ PROTESTANTE, Louis Schweitzer (éditions du Cerf, 2003)
  2. HISTOIRE DU PROTESTANTISME, Jean Baubérot (« Que sais-je ? », PUF, 2015)
  3. LE PROTESTANTISME – LA FOI INSOUMISE, Laurent Gagnebin, Raphaël Picon, (Flammarion, 2009)
  4. UN CATÉCHISME PROTESTANT, Antoine Nouis (Olivétan, 2010)
  5. LES GRANDS PRINCIPES DU PROTESTANTISME, André Gounelle (Olivétan, 2011)
  6. LA NOUVELLE FRANCE PROTESTANTE Sébastien Fath, Jean-Paul Willaime (Labor et Fides, 2011)

b) Sur les thèmes : « homosexualité » et « inclusivité » :

  1. L’HOMOSEXUALITÉ DANS LE PROCHE-ORIENT ANCIEN ET LA BIBLE, Thomas Römer, Loyse Bonjour (Labor et Fides, 2016) → L’édition 2005 peut être consultée sur internet
  2. BÉNIR LES COUPLES HOMOSEXUELS ? LES ENJEUX DU DÉBAT ENTRE PROTESTANTS, Elian Cuvillier, Charles Nicolas (Olivétan, 2015)
  3. L’ACCUEIL RADICAL – RESSOURCES POUR UNE EGLISE INCLUSIVE, Yvan Bourquin, Pierre Bühler, Joan Charras Sancho, Elian Cuvillier, Jürgen Grauling, Jean-Blaise Kenmogne, Stéphane Lavignotte, Muriel Schmid, Jean Vilbas, Marina Zuccon (Labor et Fides, 2015)

Un échange franco-suisse

nuage de mots bulles silhouette : mariage pour tous

Nous avons été en contact avec Cécile, une paroissienne de l’Église réformée de Neuchâtel. Son Église cantonale va durant sa prochaine législature revenir sur la question de la bénédiction des couples de même sexe. Elle a fait une remarquable recension avec des questionnements judicieux :

• Présentation du livre l’Accueil radical (sur l’inclusivité des LGBT) :
première partie et seconde partie

Résumé de propos de théologiens et pasteurs opposés à la bénédiction des couples de même sexe

Présentation de groupes de chrétiens homosexuels dont David & Jonathan

Avec pour base ces différents articles, nous avons produit ensemble une fiche pratique pour questionner nos Églises sur l’inclusivité (l’accueil inconditionnel de toutes personnes) que vous pouvez retrouver ci-dessous :

2016-Fiche-Pour-un-accueil-inclusif-dans-nos-Église

Lettre ouverte à l’Église Protestante Unie de France

Young businessman presenting hand drawn question marks

L’accueil des personnes homosexuelles
et la bénédiction de leur couple

L’Église Protestante Unie de France poursuit un travail synodal sur le thème de la bénédiction. Ce travail pose notamment la question de la bénédiction des couples de même sexe à l’occasion de leur mariage.

Notre association se veut un mouvement homosexuel chrétien ouvert à toutes et tous. Nous témoignons auprès des Églises, comme auprès des personnes homosexuelles, que l’on peut être homosexuel-le-s et vivre de l’Évangile du Christ, y compris dans une vie de couple où le cœur à cœur avec Dieu ainsi que l’émulation entre les membres du couple sont porteurs de fruits. C’est pourquoi le groupe protestant de l’association, dont les membres sont majoritairement paroissien-ne-s d’une église ou d’un temple de l’Église unie, s’est saisi, comme d’autres, du travail synodal de l’Église Protestante Unie de France.

Vous pouvez ouvrir le texte complet en cliquant sur ce lien :

2015-05-07-synode-EPUdF-parole-de-David-Jonathan

En bref :

Accueillir dans nos Églises, ce n’est pas seulement proposer un chemin d’Évangile, c’est également savoir recevoir de l’autre. Que cela concerne l’homophobie, le sexisme, le racisme, etc., il convient d’apprendre de l’autre ce qui peut le ou la blesser, même si cela n’est pas volontaire. Nous pensons donc sincèrement que la lutte de l’Église Protestante Unie de France contre l’homophobie doit être volontariste.

Nous sommes heureux de toutes les Églises locales qui ont fait, font et feront le choix de l’inclusion des personnes homosexuelles. Cependant, une Église qu’elle soit nationale ou locale, peut-elle se dire pleinement accueillante en refusant aux couples de même sexe la possibilité de demander à Dieu sa bénédiction sur eux, ainsi que la prière et l’accompagnement de la communauté ?

Nous invitons donc les Églises à rejeter toute homophobie, à recevoir et à accueillir les couples de même sexe et à les bénir au nom de l’Évangile du Christ, avec le reste de la communauté.

Week-end Protestants 2012

Du vendredi 9 au dimanche 11 mars 2012, nous nous sommes réunis d’abord à 8 participants, rejoints par quelques autres le samedi après-midi jusqu’à être 12. Notre rencontre avait pour thème « La différence un enjeu pour chacun et pour tous ».

Notre groupe était mixte : il y avait 2 femmes, 2 jeunes (trentenaires), une adhérente de province, 2 membres du groupe des pères. La plupart à D&J depuis plus de 4 ans. Deux venaient au week-end protestant pour la première fois. Six d’entre nous sont par ailleurs investis dans leur paroisse ou suivent des études théologiques. Le groupe rassemble des protestants de tous bords : libéraux, luthériens, réformés. Il est toujours intéressant de noter que trois d’entre nous sont des protestants “historiques”.

Il y a eu deux exposés :

2012-exposé différences et protestantisme

2012-exposé le rapport à la différence dans la Bible

Nous utilisons depuis deux ans la méthodologie d’échanges avec deux tours de paroles pour que chacun puisse faire écho de ce qui a été dit. Des idées fortes sont ressorties sur notre perception de la différence :
– Différent car minoritaire dans sa foi, dans son orientation sexuelle, sa provenance géographique (ex : ville / campagne)
– Différent et intégré
– Protéger les personnes différentes contre la stigmatisation
– Différent du coup réflexion sur la norme, amène à être moins conventionnel
– C’est une chance, un moteur
– Cumul des différences est fréquent
– Souhait parfois d’être semblable
– Différent aussi quand on est malade ; cela fait mûrir plus vite
– La différence peut être subie
– Bien parmi d’autres qui sont différents aussi
– Sentiment d’être souvent en décalage par rapport aux autres
– Quand on est différent, on peut se sentir inférieur ou supérieur
– Pour contourner le sentiment de différence, on peut s’engager pour les autres
– Différence : la richesse de la diversité
– « not bad, not good, just different »
– Notre différence implique une acceptation par soi et par l’entourage
– Certaines différences sont plus faciles à accueillir que d’autres
– L’éducation reçue enfant peut nous inscrire dans une différence
– Différent au sein du couple > la médiation conjugale peut aider à la dépasser
– Accepter l’individualité de l’un et de l’autre
– On a des limites à accepter la différence
– Chemin de la différence imposée à la différence cultivée
– Différent dans notre rapport au temps : trop lent, trop rapide
– Différence de langage qui peut mener à l’incompréhension, à des tensions
– Différence réveille des peurs
– Je suis singulier
– Ma différence, comment je la réinvesti pour d’autres ?
– Différence comme point de départ d’un chemin, d’une migration pour devenir soi-même
– C’est une dynamique intérieure
– Différent, c’est sortir de la symbiose initiale
– Sentiment d’être tiraillé
– Sentiment d’être un être contradictoire
– Dans le différent, il y a aussi l’imprévu

Voilà donc le compte-rendu non exhaustif de la richesse de nos différences partagées…